Une République « gréco-romaine » des lettres ? Les réseaux savants de l’Empire entre savoir et pouvoir (introduction)

Auteurs

Antony ANDURAND, Docteur en Sciences de l’Antiquité, Université Toulouse – Jean Jaurès, EA 4601 PLH-ERASME, anthonyandurand[at]yahoo.fr

Corinne BONNET, Professeur d’Histoire grecque, Université Toulouse – Jean Jaurès, EA 4601 PLH-ERASME, corinne.bonnet[at]sfr.fr

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DOI : https://doi.org/10.47245/archimede.hs01.ds1.01



Résumé

Ce texte se propose de cerner les implications et la portée de l’hypothèse d’une « République gréco-romaine des lettres », formulée en ouverture du volume. Envisagés sous l’éclairage de la notion de réseaux, qui a connu ces dernières années une large diffusion dans le champ de la recherche en histoire et en sciences sociales, les mondes savants de la période impériale sont envisagés comme des espaces de médiation entre Rome, la Grèce et les autres composantes du bassin méditerranéen, comme des lieux où s’opèrent des transferts de savoirs et de traditions produisant des effets structurants aux diverses échelles de l’Empire. Les communautés lettrées peuvent-elles constituer un observatoire privilégié pour interroger, dans le temps long des dynamiques culturelles, les opérations et les recompositions qui sous-tendent l’épanouissement d’un Empire « gréco-romain » – cette entité que l’on peut définir en première instance, avec Paul Veyne, comme un « fait de culture grecque et de pouvoir romain » ? L’introduction du volume se donne comme objectif de déterminer les matériaux documentaires et les outils conceptuels sur lesquels peut s’appuyer ce questionnement, construit au croisement de l’histoire culturelle, du modèle des réseaux et de l’anthropologie des pratiques savantes. Le développement de cette approche, appliquée à des thématiques encore peu explorées dans le domaine de l’histoire de la période impériale, entend ainsi apporter un éclairage neuf sur les relations entre partage des savoirs et déploiement du pouvoir, telle qu’ils s’entrelacent dans une unité culturelle désormais étendue, à travers le double référent de la pax romana et de l’hellénisme, aux dimensions de la Méditerranée.

Mots-clés : Mondes lettrés, République des lettres, réseaux, communautés, hellénisme, pratiques savantes.

Abstract

This opening paper aims at evaluating the relevance of the idea of a Graeco-Roman Republic of Letters. Analysed in terms of networks, a notion which is increasingly widespread in the field of historical research and social sciences, imperial scholarly worlds are conceived as spaces of mediation between Rome, Greece and other components of the Mediterranean, as places of knowledge and cultural transfers which produce structuring effects at several levels of the Roman Empire. Can intellectual communities be seen as a privileged field to investigate the longterm cultural dynamics and shifts which supports the development of a “Graeco-Roman Empire” – defined, according to Paul Veyne, as “a fact of Greek culture and Roman power” ? This introductory chapter explore the documentary basis and conceptual tools which can support such a proposition, involving cultural history, social network analysis and anthropology of cultural practices. This innovative approach aims at shedding new light on the relations between knowledge sharing and power deployment in a Mediterranean-wide environment, characterised by the consolidation of Pax Romana and the dissemination of Greek culture.

Keywords: Scholarly worlds, Republic of Letters, networks, communities, Greek culture, scholarly practices.