Argumentaire
Les crises sont définies par I. Wallerstein comme une manifestation des « difficultés que l'on ne peut pas résoudre dans le cadre du système, et qui ne peuvent l'être qu'en quittant et en dépassant le système historique dont ces difficultés font partie »1. Les acteurs sociaux doivent alors choisir entre le maintien du système en place et l’évolution vers des solutions nouvelles qui, bien qu’inspirées de leur expérience, sont destinée à créer un nouveau système, plus adapté. Les crises constituent une rupture du statu quo, entraînant tensions et désaccords entre les différents acteurs sociaux. On utilisera donc cette notion pour décrire un moment de transformations profondes, prélude à l'émergence de nouvelles relations sociales.
Adaptée quant à elle de la physique, la notion de résilience est aujourd’hui couramment comprise comme la capacité d’un système social à s’adapter à des contextes de risque ou de vulnérabilité. La préservation et l’aptitude à restaurer ses structures essentielles est au fondement de la résilience d’une société. Elle permet d’interroger la capacité des sociétés humaines, comprises comme un système, à interagir avec des risques d’origine environnementale (séismes, éruptions volcaniques, inondations, épidémies…) ou humaine (incendies, guerres, conflits internes…). Quelle que soit leur origine, naturelle ou anthropique, ces risques sont le produit d’un évènement imprévisible et d’une vulnérabilité humaine. En d’autres termes, on peut parler de risques quand des enjeux sociaux ou économiques sont exposés à un aléa. Personne ne peut prévoir quand aura lieu cet évènement, ni sa magnitude, mais on peut anticiper qu’il se produira. La réalisation du risque donne lieu à une crise et la résilience repose donc à la fois sur les stratégies de gestion de ces aléas et sur la capacité du groupe à revenir à un état stable après avoir été perturbé.
L’urbanisation rapide, le changement climatique et l’instabilité politique sont à l’origine de problèmes nouveaux ou de l’aggravation de ceux déjà existants. Les villes présentent une grande densité d’enjeux humains, donc de risques, et constituent pour cette raison un laboratoire privilégié pour observer comment les sociétés antiques les considèrent, vivent avec eux et font face aux crises. Pourtant, aucune des notions citées n’est identifiée en tant que telle dans les sociétés anciennes. L’agencement du territoire ou l’urbanisme d’intervention ne font pas non plus partie des intentions des acteurs publics dans le développement les villes de l’Antiquité. Ces concepts constituent toutefois d’utiles outils heuristiques pour nous aider à comprendre comment les villes antiques et du début du Moyen-Âge vivaient avec les risques. De nombreux témoignages littéraires rapportent d’ailleurs les efforts accomplis pour éviter la réalisation de perturbations prévisibles comme les inondations2, les incendies et les effondrements d’immeubles3. Des décisions publiques pouvaient également avoir pour fonction d’atténuer les charges financières de villes touchées par une catastrophe4.
Le colloque est organisé en partenariat avec Caux Seine agglo, troisième intercommunalité de Seine-Maritime, qui développe et valorise les connaissances sur le passé romain de la ville de Lillebonne dans le cadre du projet « Juliobona, la cité antique sur la Seine ». À la fois chef-lieu de la cité des Calètes et port antique sur la Seine, Juliobona bénéficie de la proximité avec la façade maritime et du fleuve. Ces paramètres constituent à la fois des atouts pour son développement, mais également des facteurs de risque. Les destructions qu’elle connaît dans la deuxième moitié du IIIe siècle et la perte de son statut administratif offrent également des pistes propices à notre réflexion.
Les participants sont invités à aborder les questions suivantes :
- la mise en place de mesures de gestion des risques (protection, prévention…) ;
- la nature des solutions élaborées pour vivre avec le risque (techniques, juridiques, mythologiques…) ;
- le rôle de l’expérience acquise lors de crises dans l’élaboration de ces mesures ;
- les solutions de retour à l’équilibre après une crise (le rôle des autorités publiques, des acteurs locaux…) ;
- la redéfinition de l’équilibre social, politique et économique après une crise.
Cet évènement est coorganisé par l’UMR 7041 ArScAn, l’Université Paris Nanterre et Caux Seine agglo dans le cadre de la Chaire européenne Jean Monnet « Ciuitates et Urbes Europæ (CivEur, Cités et villes de l’Europe) : histoire, protection et projet urbain de la ville européenne » et le projet « Juliobona, la cité antique sur la Seine ».
Comité organisateur
· Ricardo González Villaescusa (Université Paris Nanterre, UMR 7041 ArScAn) ;
· Jonas Parétias (Caux Seine agglo, UMR 7044 Archimède) ;
· Marguerite Ronin (CNRS, UMR 7041 ArScAn).
Comité scientifique
· Hélène Dessales
· Ricardo González Villaescusa
· Sabine Panzram
· Jonas Parétias
· Christophe Petit
· Marguerite Ronin
Pour plus d’informations sur l’évènement : https://civeur.parisnanterre.fr/crises-et-resiliences-urbaines/